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Page:Varlet - La Grande Panne, 1930.djvu/50

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— Savez-vous bien, mademoiselle, que je vous connais depuis des mois… Et c’est long, à notre époque accélérée.

— Des mois !…

Et, comme si elle lisait dans mon regard, elle reprit avec un sourire où je crus discerner un peu d’ironie et de lassitude :

— Ah oui, au cinéma… Je suis un personnage de l’actualité mondiale. Qui ne me connaît pas, à l’écran ? Ce genre de célébrité m’a déjà valu des déclarations, orales ou écrites, d’innombrables admirateurs. Si j’étais une « vamp », comme ils disent aux États-Unis… une femme fatale… j’aurais de quoi m’amuser. Mais je ne désire même pas qu’on me fasse la cour ; au contraire, cela suffit à m’éloigner de quelqu’un. Savez-vous que depuis deux ans j’ai reçu douze cent trente-sept demandes en mariage ?

L’avertissement était clair, mais je fus piqué au vif ; allait-elle me confondre avec le troupeau de ses ridicules soupirants ?

Je répliquai :

— Que m’importe ! La badauderie et le snobisme n’ont rien à voir dans mon cas. Dès la première fois que j’ai vu votre image, je vous ai reconnue, comme si nous avions déjà vécu dans une autre existence antérieure… Et aujourd’hui que je vous ai retrouvée…

Elle m’interrompit, d’un ton calme et indulgent :

— Monsieur Delvart, vous oubliez que moi je ne