Aller au contenu

Page:Varley - Une jeune fille à la page, 1938.djvu/3

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 3 —

CHAPITRE PREMIER

Antal et Claude, mes frères, tombent toujours amoureux de la même femme. Ils prétendent que c’est parce qu’ils sont jumeaux. Je n’y crois guère. Bien que jumeaux, ils s’appliquent, d’habitude, à vouloir des choses différentes.

Quoi qu’il en soit, dès que l’un d’eux jette son dévolu sur une femme, l’autre la veut à tout prix. Il finit généralement par l’avoir, soit le premier, soit le deuxième, quelquefois d’accord avec son frère, mais le plus souvent en employant des moyens moins honnêtes.

Ce jour, toute la famille est sur la terrasse fleurie. C’est l’heure exquise de fin d’après-midi, l’heure du thé, qui nous réunit d’habitude. L’automne et la senteur des bois pourrissants, senteur mâle et vivifiante, nous encense par bouffées.

Antal et Claude sont penchés sur la liste des invités qui vont arriver ce soir, pour les chasses, au château de Valfosse. Et c’est sur cette liste qu’ils ont fait un choix d’où leur dispute est née.

Je délaisse un moment mon livre et leur demande :

— Vous lui avez demandé son avis, à Claire ?

— Non, bien sûr. Nous arrangeons d’abord entre nous celui qui va lui faire la cour, répond Antal.

— Et vous croyez qu’elle acceptera comme ça ?