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CHAPITRE VIII

Kouka m’était devenu une drogue indispensable. Loin de lui, j’oubliais sa présence mais, dès que tombait la nuit, un souvenir précis me tenaillaient : celui de son sexe monstrueux qui entrait si bien en moi… Je rejoignais le dancing et mon amant à peau sombre.

Toujours à la même table, sans rien voir, j’attendais, devant une coupe de punch glacé, qu’il vînt me rejoindre.

Ce soir-là, je suis très en beauté. Les glaces me renvoient mon profil régulier et j’aperçois ma nuque où retombent, en masse, des cheveux auburn ensanglantés sous les lumières. Une robe de satin vert, à peine décolletée, marque mon buste. On me regarde ; j’en suis presque heureuse ; un sourire joue sur mes lèvres…

Tout à coup mon sourire disparaît et mon cœur se contracte. Mes yeux viennent de rencontrer un jeune homme, à la table voisine, et je sens que mon regard ne m’appartient plus.

Il est encore plus étrange que beau. Son visage triangulaire le fait ressembler à un félin. Ses yeux, très allongés, laissent filtrer un regard bleu, tendre et cruel. Il a des cheveux invraisemblablement blonds, couleur de miel, et des dents éblouissantes, une carnation plus exquise que celle d’aucune femme présente ; une carrure impressionnante sous l’habit noir, et des mains longues et sensibles complètent l’ensemble. Il a l’air d’un jeune dieu nordique, un être de la mer…