Page:Vasari - Vies des peintres - t1 t2, 1841.djvu/258

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Parti du même point, il arrivera au même terme, l’étranglement de l’art, par un chemin différent ; il dira, et plus éloquemment, si l’art a été inventé au treizième siècle. Quelque cause supérieure avait déterminé sa naissance. Que pouvait-ce être, sinon quelque grande et nouvelle inspiration apportée au monde ? Sous cette inspiration puissante, l’art a surgi ; il a été grand tout d’abord, car son but et sa forme lui avaient été révélés. Or, une aussi complète et admirable révélation implique l’immobilité ou la chute. L’art a péché, lui aussi, comme Adam ; il a quitté l’abri de sa conviction première, de sa forme originelle ; il a été s’éprendre à des affections étrangères ; il s’est prostitué dans les adorations païennes, et il y a trouvé son germe de mort. L’art éclos au treizième siècle, plein de grâce, de force et de beauté, n’était plus au seizième siècle qu’un rebutant cadavre que l’âme avait déserté. La faute en est à Léonard, au Bramante, à Raphaël, à Michel-Ange, au Corrège, au Giorgione, à André del Sarte, au Titien, qui se sont honteusement repus du fruit défendu, et qui ont ouvert la porte à toutes les réminiscences impures de l’art antique, contre lequel Dieu cependant avait suscité les Barbares et tous ses fléaux. Maintenant, jeunes gens, vous n’avez plus qu’une chose à faire, c’est de vous humilier et de vous couvrir de cendres ; vous n’avez plus qu’un chemin : c’est le dur sentier de la réhabilitation. Oubliez et priez, et les trésors du treizième et du quatorzième siècles vous seront ouverts. Les grands et simples exemples des Giotto, des Orcagna, des