Page:Vasari - Vies des peintres - t1 t2, 1841.djvu/55

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non seulement par sa noblesse, sa bonté et son savoir, mais encore par son amour éclairé des beaux, arts ; aussi a-t-il justement mérité d’être choisi pour lieutenant du duc Cosme dans notre Académie du dessin. Mais revenons à Cimabue. Il n’est que trop vrai que sa renommée s’éclipsa devant celle de Giotto, de même qu’une petite lumière pâlit à côté des rayons éclatants d’un grand foyer. Cimabue fut le premier qui restaura l’art de la peinture ; mais Giotto, son élève, aiguillonné par une louable ambition, et favorisé du ciel et de la nature, ouvrit la porte de la vérité à ceux qui ont poussé l’art à cette perfection et à cette hauteur où il se trouve à présent. Notre siècle, accoutumé à voir chaque jour les prodiges et les miracles enfantés par nos artistes, est arrivé au point de rester presque indifférent devant les plus merveilleux chefs-d’œuvre, quoiqu’ils semblent dus à la Divinité elle-même plutôt qu’au génie de l’homme. Heureux encore seraient ceux qui embrassent avec courage cette pénible carrière, si, au lieu d’éloges et d’encouragements, ils ne recueillaient pas le blâme et même souvent la honte !

Simone de Sienne introduisit le portrait de Cimabue dans son tableau de la Foi que possède le chapitre de Santa-Maria-Novella. Le visage est de profil et maigre, la barbe courte, un peu rousse et pointue : le front est couvert d’un chaperon qui enveloppe le cou avec grâce : à côté, Simone se peignit lui-même de profil, à l’aide de deux miroirs. Entre eux, un soldat armé représente, dit-on, le comte Guido Novello, alors seigneur de Poppi.