Page:Vasari - Vies des peintres - t1 t2, 1841.djvu/570

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répété d’après le Vasari, il n’y a de vrai qu’une seule chose, à savoir, que la Mandorla est encore regardée par les artistes modernes comme un chef-d’œuvre. En effet, la Vierge et les anges qui l’accompagnent dénotent une merveilleuse adresse d’exécution, un goût gracieux, et, en même temps, une modération et une sobriété dont le charme, pour être doux et tranquille, n’est pas moins puissant. Le saint Thomas qui reçoit la ceinture des mains de la Vierge a un caractère de simplicité et de dévotion qui n’exclut pas la grandeur et l’intelligence. On comprend que la statuaire s’est élancée à une vie nouvelle, que définitivement elle est affranchie des liens que lui avait imposés un austère ascétisme. Il n’est pas jusqu’à l’ours qui se cramponne aux branches d’un poirier, dont l’expression fine et malicieuse ne révèle une tendance prononcée à l’abandon des formes grêles, symétriques et monotones, d’un rigide symbolisme. Cette figure prêtait matière aux commentaires des déchiffreurs de hiéroglyphes. Les uns ont voulu y voir le démon se consumant en vains efforts pour arriver à la hauteur de la Vierge et des anges ; d’autres, s’appuyant sur l’ancien proverbe si populaire en Italie : Dar le pere in guardia all’orso, y ont lu simplement une satire innocente contre quelque fabricien ou marguillier dont Nanni aurait eu à se plaindre. Quant à nous, nous garderons un prudent silence sur cette grave question ; nous imiterons la réserve de notre auteur qui laisse chacun libre d’interpréter l’énigme à sa façon.