Page:Vasari - Vies des peintres - t1 t2, 1841.djvu/58

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pris. S’il ne s’était pas permis de poser en fait que, lorsque Cimabue parut, la peinture était en Italie plutôt entièrement perdue qu’égarée de la bonne voie, eût-on cherché à établir qu’il y avait eu en Italie des peintres avant ce Florentin ? On s’en fût évité la fatigue, parce que personne n’en eût douté sans sa malencontreuse assertion. Nous ne répondrons à ceci qu’une chose ; c’est qu’avant de se décider à entrer en lutte avec un auteur, il faut l’avoir lu, pour bien comprendre ce qu’il dit, et le sens dans lequel on doit l’entendre. En effet, le Vasari n’a jamais prétendu affirmer que Cimabue ait été le premier peintre qui ait paru en Italie. Son livre fournit partout la preuve du contraire. Il est explicite à cet égard dans sa savante et naïve préface. Il l’est encore davantage dans sa sixième biographie, où il fait apparaître un Toscan, un peintre né comme lui à Arezzo, dont il a vu et dont il détaille les nombreux ouvrages. Or, ce peintre d’Arezzo, le Vasari ne le donne-t-il pas nettement comme antérieur à Cimabue ? Ce n’était donc pas la peine de lire et d’écrire tant de volumes pour tarabuster le Vasari, à propos d’une phrase échappée à sa plume facile, quand lui-même il en fournit la rectification. C’était vraiment du don Quichotisme de vouloir prendre ainsi au pied de la lettre, et longuement réfuter un homme qui vient de vous dire, avec une égale ingénuité, qu’il n’hésite pas à admettre l’existence de l’art avant le déluge. Il ne saurait alors s’agir, dans la question, de citer tel ou tel peintre comme ayant vécu avant Cimabue, mais bien d’en trouver un dont