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LUCA DELLA ROBBIA.

rières élevées par la superstition, la crainte ou l’ignorance ; lorsqu’il se fut élancé intrépidement en avant, d’un côté s’appuyant sur la nature, de l’autre sur les chefs-d’œuvre de l’antiquité, tous se levèrent ; mais l’haleine leur manqua, et leurs pieds engourdis se refusèrent à suivre les traces qu’il imprimait dans sa course rapide. Affaiblis, hébétés par une longue misère, il leur fallut bien du temps pour rendre à leurs sens émoussés une énergique vitalité. Et quand ils se furent dépouillés de leurs vieux langes, quand ils se trouvèrent prêts pour la marche, le Pisan avait franchi un tel espace, qu’un demi-siècle leur suffit à peine pour le rejoindre. Sans compter les obstacles qui se rencontraient naturellement sur la route, ils s’en étaient créé eux-mêmes une multitude par leurs hésitations sans cesse renaissantes en présence des nouvelles formules. À la moindre difficulté, ils jetaient un regard inquiet vers le ciel, s’arrêtaient et ne repartaient que quand ils se sentaient poussés par derrière. Ainsi s’explique la lenteur de leur allure.

Quelle cause maintenant assigner à cette surabondance de séve, à cette luxuriante fertilité que la sculpture va tout d’un coup développer ? Andrea de Pise a dépassé le Pisan Niccola. À son tour, Andrea doit être dépassé. Florence surtout, Florence s’émeut. De Florence, à l’instant, sortent en foule de robustes athlètes qui, tous ardents, se précipitent vers le même but. Les hommes de Florence ne sont plus ces faibles et timides enfants qui naguère attendaient, réclamaient un guide, un