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MASACCIO DA SAN-GIOVANNI.

progrès, toute incertitude cessa ; on se rallia à lui de toutes parts, pour aller en avant d’un commun accord. À cette révolution, qui avait substitué la liberté individuelle à l’unité despotique du dogme, il ne fallut qu’un siècle pour porter ses fruits. La réédification devait suivre de près la destruction. À côté des ruines amoncelées, s’entassaient de précieux matériaux. À mesure que l’on démolissait le passé, on jetait les fondements de l’avenir. Si, d’un côté, on entretenait le doute, on raillait la croyance, on cassait les symboles, d’un autre côté, on résolvait des problèmes, on consacrait l’examen, on réhabilitait la forme. L’harmonie présidait à l’anarchie. Ces régénérateurs étaient réunis par un même sentiment, vivifiés par un immense et unanime espoir. Aussi leur ardeur, leur persévérance, leur dévouement, présageaient-ils d’infinis triomphes. Dès le premier choc, les disciples de Byzance avaient vu leur zèle s’amoindrir, leur foi s’affaiblir. S’ils se défendaient encore contre le brûlant enthousiasme qui s’agitait autour d’eux, ils se dépitaient en secret contre les séculaires traditions auxquelles ils s’obstinaient à rester fidèles. La vieillesse a souvent conscience de la pesanteur de son allure ; mais pourrait-elle la changer pour la verdeur de la jeunesse, quand même elle l’essaierait ? Ainsi, tandis que les Giotto, les Stefano, les Gaddi, les Orcagna, les Giottino, travaillaient avec énergie à l’œuvre de rénovation, les Margaritone, les Ugolino, les Buffalmacco, les Duccio, renonçaient à les suivre, exhalaient leurs regrets en paroles amères, et se