Page:Vasari - Vies des peintres - t1 t2, 1841.djvu/715

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sur le point de s’enfuir de Florence. S’il n’eut été réconforté par Donato et par Luca della Robbia, il n’aurait pu résister à toutes ces tracasseries. Combien est impie et cruelle la rage des envieux ! Certes, il ne tint pas à eux que Filippo ne brisât ses modèles, ne brûlât ses dessins, et ne détruisît en une demi-heure le fruit de tant d’années de recherches et de travaux. Les intendants s’excusèrent auprès de lui, et l’exhortèrent à aller en avant, l’assurant qu’il serait toujours considéré comme l’inventeur et le seul auteur de la coupole. Néanmoins, ils allouèrent à Lorenzo un égal salaire.

Brunelleschi était presque découragé ; il sentait qu’il aurait toute la peine, et qu’il lui faudrait partager la gloire de son invention avec Lorenzo. À la vérité, l’espérance d’écraser son rival le ranima, et il commença à mettre en œuvre son projet, tel qu’il l’avait décrit dans son mémoire. Bientôt il imagina de faire un modèle dont il confia l’exécution à un menuisier nommé Bartolommeo. Ce modèle, conçu selon l’exactitude rigoureuse des proportions de la coupole projetée, renfermait tous les détails les plus difficiles, les escaliers éclairés, les escaliers obscurs, les différentes ouvertures pour le jour, les portes, les chaînes, les éperons, et même une petite galerie. Lorenzo voulut en avoir connaissance. Sur le refus qu’il éprouva, il entra en colère et en entreprit un autre, de son côté, afin de paraître ne pas recevoir un salaire pour rien. Le modèle de Brunelleschi coûta cinquante livres et quinze sous, comme on le trouve consigné sur le registre de Migliore di