Page:Vasari - Vies des peintres - t3 t4, 1841.djvu/255

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avec lesquelles il a saisi la double vie de l’âme et du corps, que l’on oublie que ses personnages par leurs costumes ne peuvent appartenir à l’époque où se sont passés les faits qu’il a voulu représenter. Toutes ces figures sont pleines d’intentions si vraies et si naïves, leurs attitudes ont tant de dignité et de naturel, leurs ajustements eux-mêmes sont si pittoresques, et enfin leur présence est si nécessaire à l’aspect majestueux de l’ensemble, qu’il serait impossible d’y rien changer sans nuire au caractère de l’idéal que le sujet commande.

L’Histoire de saint François, que Ghirlandaio a laissée dans l’église de la Trinità, se distingue par ce même cachet de vérité si fortement empreint sur la plupart des productions du quinzième siècle, et, en outre, par une amélioration sensible apportée à l’ordonnance des groupes et à l’arrangement de la scène que jusqu’alors la tradition avait condamnés à une froide symétrie. Sans infidélité aux convenances de son sujet, Ghirlandaio put introduire tout à son aise dans cette composition, sous les costumes de son temps, les portraits les plus exacts de ses compatriotes. L’habileté avec laquelle il su donner à ces objets de pure imitation une grandeur de forme et d’idéalité, que la nature toutefois ne saurait désavouer, montre qu’il avait atteint les sphères les plus élevées de l’art. Tous ses autres tableaux fourmillent également de portraits qui, sans doute, ne contribuèrent pas médiocrement à le rendre cher à Florence, dont Vasari nous a dit qu’il fut les délices ; car cette noble ville aimait à