Page:Vasari - Vies des peintres - t3 t4, 1841.djvu/474

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drapeau ; composition digne d’un grand maître, et pleine d’intentions admirablement exprimées.

La vengeance, la colère, la rage animent les guerriers, dont les chevaux eux-mêmes partagent l’acharnement.

Deux de ces derniers, les jambes entrelacées, se déchirent avec les dents et se heurtent avec fureur. Le soldat porteur de l’enseigne, les épaules en avant et le corps retourné, presse son cheval et tire à lui le drapeau qu’il espère arracher brusquement aux quatre cavaliers qui l’ont saisi à la fois, deux pour le défendre, deux pour l’attaquer. Ceux-ci cherchent à couper la hampe, tandis qu’un vieux soldat, coiffé d’un énorme bonnet rouge, se précipite en criant, et le sabre levé, pour abattre les poignets de ceux qui, dans une attitude terrible, et grinçant des dents, retiennent cette enseigne tant disputée.

Sous les jambes des chevaux, et en raccourci, deux soldats aux prises se roulent l’un sur l’autre. Celui qui a l’avantage cherche à égorger avec son poignard le malheureux vaincu, qui lutte avec désespoir pour échapper à la mort.

On ne saurait trop admirer l’habileté avec laquelle Léonard dessina ces soldats, et sut varier leurs vêtements et leurs armes. La beauté ravissante des lignes et des formes de ses chevaux et la vigueur de leur musculature surpassent tout ce que les maîtres ont fait en ce genre (13).

On dit que, pour dessiner ce carton, il inventa une machine fort ingénieuse, s’élevant lorsqu’on la rétrécissait, et s’abaissant quand on l’élargissait.