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TORRIGIANO,
SCULPTEUR FLORENTIN.



Une violente fureur s’empare des artistes présomptueux et vains qui, au moment où ils se croient arrivés au premier rang, voient s’élever tout à coup un brillant génie qui les écrase. Dans leur rage, ils broieraient le fer et ne reculeraient devant aucune espèce de vengeance ; car la honte d’être égalés en mérite par des enfants qu’ils ont vus naître leur paraît le plus horrible des supplices. C’est qu’ils ignorent les immenses progrès que peuvent faire des jeunes gens soutenus par une volonté forte et des études consciencieuses suivies dès l’enfance ; tandis que les vieillards impuissants, tiraillés par la peur, l’orgueil et l’ambition, deviennent ineptes et stupides, font le pire lorsqu’ils croient faire le mieux, et reculent lorsqu’ils croient avancer. Envieux et obstinés, ils se refusent à reconnaître la perfection des œuvres de leurs heureux rivaux, si évidente qu’elle soit ; et s’ils redoublent d’efforts pour montrer leur science, ils n’enfantent que des œuvres ridicules et dignes de pitié.