Page:Vasari - Vies des peintres - t5 t6, 1841.djvu/244

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lendemain, 11 mars, tous les peintres, les sculpteurs et les architectes se rassemblèrent sans bruit, autour de l’église de San-Piero-Maggiore. Ils n’avaient apporté qu’un drap de velours brodé d’or, pour couvrir le cercueil et le brancard. À une heure de la nuit environ, les plus âgés et les plus distingués d’entre eux prirent des torches en main, tandis que les jeunes gens s’emparaient du brancard et s’estimaient fiers de porter le corps du plus grand artiste qui eût jamais existé. Beaucoup de personnes ayant remarqué ce rassemblement, bientôt toute la ville sut que le corps de Michel-Ange était arrivé, et devait être porté à l’église de Santa-Croce. On avait agi cependant avec tout le secret possible, pour éviter le tumulte et la confusion ; mais la nouvelle passa de bouche en bouche, l’église fut envahie en un instant, et les académiciens eurent beaucoup de peine à parvenir jusqu’à la chapelle. On ne peut nier que, dans les cérémonies funèbres, un grand déploiement de prêtres, de religieux, de moines, un grand appareil de torches, de tentures et d’habits de deuil ne forment un spectacle magnifique ; mais combien n’était-il pas plus imposant de voir ce concours immense d’artistes habiles, réunis à l’improviste autour des dépouilles mortelles de leur chef, de leur maître ? À travers les flots de la multitude qui célébrait les louanges de Michel-Ange, on arriva enfin à Santa-Croce. Après avoir été reçu par les religieux, avec la solennité ordinaire, le corps fut déposé dans la sacristie. Alors, le lieutenant de l’Académie, qui s’y était