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Page:Vasari - Vies des peintres - t9 t10, 1842.djvu/603

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saires pour étudier. J’oserai affirmer, sans crainte de me tromper, que cette époque fut celle où je fis le plus de progrès, bien que les leçons des maîtres que j’ai mentionnés plus haut aient été loin de m’étre inutiles. Enflammé du désir d’apprendre, je passais la nuit et le jour à dessiner avec une ardeur redoublée encore par l’émulation excitée en moi par les jeunes artistes avec qui j’étais lié. L’amour de la gloire et la vue des maîtres que leur talent avait portés à la fortune et aux honneurs étaient pour moi de puissants aiguillons. Parfois je me disais : « Pourquoi, à force de travail et de persévérance, n’arriverais-je pas aussi haut que tant d’autres ? Ne sont-il par formés de chair et d’os comme moi ? » De plus, stimulé par le besoin qu’avait de moi ma famille, je résolus de n’épargner ni peines, ni fatigues, ni veilles, ni efforts, pour atteindre le but que je me proposais. En conséquence, je ne laissai alors à Rome et ensuite dans les autres villes que j’habitai, ni tableaux, ni statues, ni édifices antiques ou modernes, sans les dessiner. Je copiai, en compagnie de Francesco Salviati, la voûte et la chapelle de Michel-Ange et tous les ouvrages de Raphaël, de Polidoro et de Baldassare Peruzzi. Le jour, nous avions soin de dessiner des choses différentes ; puis, la nuit, je copiais les études de Salviati, tandis que de son côté il reproduisait également les miennes, de sorte que chacun de nous avait dans ses cartons les dessins de tout ce que nous avions vu. Souvent nous ne prenions le matin qu’un très-léger repas sans même nous asseoir.