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PRELIMINAIRES.

roit contribuer au bien d’une autre ſans ſe nuire eſſentiellement à ſoi-même, ſon obligation ceſſe dans cette occaſion particulière, & la Nation eſt cenſée dans l’impoſſibilité de rendre cet office.

Les Nations étant libres & indépendantes les unes des autres, puisque les hommes ſont naturellement libres & indépendans ; la ſéconde Loi générale de leur Société eſt que chaque Nation doit être laiſſée dans la paiſible jouiſſance de cette Liberté, qu’elle tient de la Nature. La Société naturelle des Nations ne peut ſubſiſter, ſi les Droits que chacune a reçus de la Nature n’y ſont pas reſpectés. Aucune ne veut renoncer à ſa Liberté, & elle rompra plutôt tout commerce avec celles qui entreprendront d’y donner atteinte.

De cette Liberté & indépendance ; il ſuit que c’eſt à chaque Nation de juger de ce que ſa Conſcience exige d’elle, de ce qu’elle peut ou ne peut pas, de ce qu’il lui convient ou ne lui convient pas de faire ; & par conſéquent d’examiner & de décider ſi elle peut rendre quelque office à une autre, ſans manquer à ce qu’elle ſe doit à ſoi même. Dans tous les cas donc où il appartient à une Nation de juger de ce que ſon devoir exige d’elle, une autre ne peut la contraindre à agir de telle ou de telle maniére. Car ſi elle l’entreprenoit, elle donneroit atteinte à la Liberté des Nations. Le droit de contrainte, contre une perſonne libre, ne nous appartient que dans les cas où cette perſonne eſt obligée envers nous à quelque choſe de particulier, par une raiſon particuliére,

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