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LE CENTENAIRE D'EMMANUEL

Ma poitrine se prenait de plus en plus, des râles sortaient de ma gorge, des battants de cloches martelaient mes tempes ; c’étaient, autour de moi, des chocs tumultueux de fontes, un fracas de train bondissant à toute vitesse, le bruit de la mer submergeant un monde… Et la souffrance de mes membres, la souffrance de mon ventre, la souffrance de mon coeur me montaient à la tête comme une ivresse redoutable, et faisaient naître en mon cerveau des pensées de crime… Je tombai de nouveau et je perdis connaissance… Combien de temps restai-je ainsi, je ne saurais le dire. Une tiède haleine sur mon visage me réveilla. Le pauvre chien couché auprès de moi me réchauffait de son corps et tentait de timides caresses pour me tirer de mon engourdissement. Je m’étonnai de ne plus souffrir, de me sentir reposé et moins faible.

Maintenant, la pluie tombait fine, serrée, glacée. Je me remis en route pour retourner à Paris, chez mon compagnon d’infortune. Mais, je n’avais plus une idée très nette des distances. Paris, c’était le salut, l’espoir reconquis… Pourquoi donc étais-je venu dans ce lieu de détresse ?… Je me souvins, et un rire éclatant vibra dans la nuit : Ah ! oui, la gloire !… le centenaire d’Emmanuel !…

Je nouai autour de mon cou ce qui restait de