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UNE VENGEANCE

soupir me tira de cette sorte d’engourdissement vague qui précède le sommeil. Mon ami avait fait un mouvement, et, bientôt, je l’entendis qui murmurait :

— Jean, ne me quitte pas ! Protège-moi !… Elle est là, je la sens, je la vois… Oh ! qui me délivrera de son spectre terrible !

— Ecoute, lui dis-je avec aigreur, je ne comprends rien à tes imaginations. A qui en as-tu, et quel danger te menace ? Depuis mon arrivée ici, je flotte dans un monde fantastique où mon esprit s’égare. Je veux soigner les malades, mais je suis impuissant à guérir les fous.

Georges se mit à pleurer.

— Que deviendrai-je si tu m’abandonnes ?… Ta charité ne s’exercera pas longtemps, d’ailleurs, je sens que je m’en vais. Ce n’est pas la mort qui m’épouvante, mais les visions terribles qui accompagnent ma lente agonie. Oui, j’aurais dù plus tôt me confier à toi, délivrer mon cœur du secret qui l’oppresse ; mais je n’osais pas, j’avais promis de me taire…, tu comprends, l’honneur d’une femme…

— Tu peux parler sans crainte, je sais qu’un violent amour a bouleversé ta vie, mais je ne m’explique pas, à présent, ta solitude et ton désespoir.

— Comment expliquer l’inexplicable ? Oui ! je