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RÉINCARNATION

— Nous nous sommes bien aimés, cette nuit, Bérengère. Vous vous en souviendrez, n’est-ce pas ?… Vous direz à tous que vous êtes parfaitement heureuse ?

Elle s’agita fébrilement.

— Je le dirai, Ghislain… Réveillez-moi !

Il fit quelques passes rapides, et sa respiration devint plus forte. Elle promena les mains sur son visage, et l’iris apparut dans le globe de l’œil. Aussitôt un sourire épanouit ses traits.

— Que je suis contente ! murmura-t-elle : je ne méritais pas tant de bonheur. Comme je t’aime, et comme tu m’aimes !… Nous aurons beaucoup de nuits semblables, mon adoré ?… Je savais bien que ton cœur me reviendrait, qu’un jour, tu serais tout à moi !

Elle s’habilla et descendit dans le jardin. Jamais elle n’avait été aussi joyeuse. Ses parents vinrent la voir, et s’étonnèrent de son exaltation. Ses yeux avaient un éclat un peu fiévreux, son teint était brouillé ; mais le bonheur laisse parfois les mêmes stigmates que la peine. Le marquis et la marquise de Sainte-Laure ne s’inquiétèrent donc pas outre mesure de l’état de leur fille. Par la suite, d’ailleurs, elle garda le même air charmé, bien qu’elle changeât visiblement. Lorsqu’on lui demandait des nouvelles de sa santé, elle se disait fort bien portante et pleine-