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L'ANARCHISTE

Mais, à côté de l’ironie française qui ne perd jamais ses droits, se dressait le spectre rouge de la terreur, visible, de quelque côté que l’on dirigeât le regard. Il était là, sinistre, colossal, et sa main semblait s’étendre sur le monde…

Les esprits malveillants accusaient la police de ne pas faire consciencieusement son devoir. On la jugeait timorée dans la recherche des coupables, indécise et mal dirigée. On s’étonnait de ne pouvoir trouver un remède aux souffrances du peuple qui demandaient à être comprises et guéries après des siècles de résignation. Les plus courageux se sentaient glisser à l’abîme, tout en tâchant de se donner l’illusion d’une folie momentanée soufflant sur le monde comme un vent d'orage. Pour moi, j’étais assez rassuré, sachant que l’heure n’était pas venue, que bien des années passeraient encore avant le renversement des puissances humaines.

L’anarchie n’est pas suffisamment organisée et ses partisans ne sont pas assez nombreux pour lutter avec avantage contre une société admirablement défendue, quoi qu’on en dise ! Si la loi est inique et menteuse, si les magistrats sont les courtisans des forts, si le travail et la probité sont rarement récompensés, il ne s’est pas encore trouvé un parti assez habile et assez impeccable pour s’imposer aux masses. Au lieu de régler