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LA PETITE-ŒUVRE

Verjus, plus particulièrement, était inconsolable. « C’est à lui, après Dieu, écrit-il, que je dois d’avoir été sauvé. » Hâtons -nous de dire qu’il fut bientôt l’un des enthousiastes admirateurs du P. Marie. Ce n’était pas cette fois légèreté de nature et inconstance, mais plutôt l’effet naturel d’une âme spontanée et franche, d’un cœur droit et bon.

Le P. Marie avait d’ailleurs tout ce qu’il faut pour être aimé de la jeunesse : il l’aimait lui-même à plein cœur. Qu’on en juge par les lignes suivantes, empruntées à une lettre qu’il écrivait, l’année même de sa mort, à l’un de ses enfants d’autrefois, devenu à son tour directeur de la Petite-Œuvre : « Quels souvenirs vous me rappelez, mon bien-aimé Père et Enfant ! Que j’aime à y penser et à vous revoir tous autour de moi, à l’étude, dans la cour, en promenade, à la chapelle surtout ! Cette union des âmes en Dieu et pour Dieu nous était un avant-goût du Paradis. Qu’il est rare, hélas ! de trouver le bonheur au degré où nous avons joui ! Au ciel, nous verrons que nous nous en rapprochions alors, et que nos joies en descendaient[1] ... »

Si le Père se souvenait, les enfants n’oubliaient pas. L’un d’eux écrivait, à l’occasion des noces d’argent de la Petite-Œuvre, cette page émue : « Il nous appartenait tout entier : ses jours et ses nuits, son cœur si tendre et si élevé, sa haute et belle intelligence, son admirable éloquence qui retentit si souvent dans les chaires les plus illustres, et dont Bruxelles conserve encore, après quinze années, un vivant souvenir[2] ; tout cela, il le consacrait exclusivement à quarante petits enfants, souvent incapables de le comprendre, mais incapables aussi d’échapper à l’ascendant de sa vertu et de sa piété. De quelle manière suave et vigoureuse à la fois il façonna ces jeunes âmes d’enfants qu’il s’était inviolablement attachés pour les donner plus sincèrement et plus entièrement à Dieu ! Non, tant que vivra un seul de ceux qui furent formés à son école, l’em-

  1. Annales françaises de Notre-Dame du Sacré-Cœur, juin 1883.
  2. Bruxelles... On peut ajouter Barcelone, où le Père était fort goûté de la colonie française.