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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/273

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— 1814 —

et, comme on le verra, il était officiellement décidé depuis plusieurs jours, qu’ils n’en savaient même rien encore.

L’envahissement du territoire français par une armée ennemie remontait aux premiers jours d’octobre 1813 : le 7 de ce mois, le duc de Wellington avait déjà franchi la Bidassoa à la tête de 140,000 soldats anglais, espagnols et portugais. Cet événement ne put déterminer la petite cour d’Hartwell à quitter son rôle d’observation silencieuse et passive. Il ne fallut rien de moins que l’invasion de la Suisse par les Alliés, à près de trois mois de là, le 21 décembre ; le passage du Rhin par Blücher dans la nuit du 1er janvier 1814, et l’envahissement de la haute Alsace et de la Franche-Comté par Schwartzenherg, le même jour, pour réveiller les espérances du chef de la maison de Bourbon. Mais, à cette date même, la politique des Cabinets, l’éloignement et l’oubli systématiques où le tenaient depuis si longues années les souverains du continent, permettaient difficilement à Louis XVIII une pétition de droits directe, une démarche officielle. Ce fut donc par une voie détournée qu’il essaya de rappeler à l’Europe victorieuse sa personne et ses titres de Prétendant. Les 12 et 14 janvier 1814, son frère et ses deux neveux, après d’assez nombreuses démarches, obtinrent du gouvernement britannique l’autorisation de se rendre, sur bâtiments anglais, — le comte d’Artois, dans un des ports de la Hollande gardés par une flotte anglaise ; le duc d’Angoulême, au port de Saint-Jean-de-Luz, alors occupé par Wellington ; et le duc de Berri, à l’île anglaise de Jersey.

Louis XVIII, en envoyant le plus jeune de ses neveux à Jersey, avait compté que sa présence déciderait sinon un mouvement, du moins une manifestation royaliste dans les anciennes provinces de l’Ouest. Ses souvenirs le trompaient. Le temps avait marché pour la Bretagne et la Vendée comme pour le reste de la France. Les jeunes enthousiastes des insurrections de 1793 à 1797 avaient atteint l’âge mûr ; les hommes faits de cette époque étaient devenus des vieillards ;