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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/327

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— 1814 —

et de porter un dernier et décisif avis à l’Impératrice, Joseph ne s’était pas borné à oublier complétement cette promesse : installé paisiblement, le matin du 30, aux fenêtres d’un pavillon appelé le Château-Rouge, il ne fit pas autre chose, ainsi que Jérôme et le duc de Feltre, depuis sept heures et demie du matin jusqu’à une heure de l’après-midi, que d’envoyer aux nouvelles et de tâcher de saisir, à l’aide de longues-vues, quelques détails des sanglants assauts que livraient les Alliés aux troupes de Marmont. Vainement dans Paris, hors Paris, 40 à 50,000 hommes, toute une armée, nous ne saurions trop le redire, émus depuis la veille par le bruit des canons alliés, demandaient des armes et des ordres ; aucune autorité ne répondait. Telle était l’absence, à cette heure suprême, de tout commandement et de toute direction, qu’à dix heures une partie de l’artillerie de position des deux maréchaux avait dû tirer avec des gargousses d’un calibre inférieur, et que, vers midi, plusieurs batteries avaient même complétement manqué de munitions, circonstance qui fut la première cause du ralentissement du feu. Cependant les munitions existaient en aussi grande quantité que les approvisionnements : le seul magasin de Grenelle renfermait 300,000 quintaux de poudre en barils, 5 millions de cartouches d’infanterie, 25,000 cartouches à boulet, et 3,000 obus chargés ; le parc de campagne, en outre, était approvisionné outre mesure ; enfin, la poudrière de Vincennes était encombrée. Aussi n’y avait-il qu’un cri d’indignation et de colère parmi les troupes de Mortier et de Marmont. Mais qu’importaient ces plaintes et ces clameurs au frère de l’Empereur et au duc de Feltre ! Indifférents à tous les soins qui n’intéressaient pas leur sûreté personnelle, ce roi de hasard et ce ministre sans courage n’attendaient que le moment de fuir. Aussi, lorsque, vers une heure, le duc de Raguse fit dire à Joseph que les positions où il s’était jusqu’alors maintenu commençaient à être forcées, et qu’un des corps amenés par Blücher s’avançait, par Romainville, sur