Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/38

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
34
— 1793 - 1799 —

duisit plus tôt qu’ils ne le pensaient ; et, cette fois encore, elle les surprit beaucoup plus qu’elle ne leur profita. Vingt jours après la bataille de Zurich, le 14 octobre, on apprenait à Paris que le général en chef de l’armée d’Égypte, Bonaparte, venait de débarquer en Provence.

Nous l’avons dit, le pouvoir exécutif, à cette époque, était sans force, les Assemblées législatives sans influence, les corps constitués sans considération, l’esprit public sans énergie. La majorité des citoyens, mécontente et lassée du Directoire, voulait maintenir la République, mais avec d’autres gouvernants et une autre administration. Comment et par qui opérer ce changement que tous les partis pressentaient, auquel tous aspiraient ? Un moment, les regards s’étaient dirigés, d’abord, vers Hoche, enlevé prématurément aux espérances des amis de la Révolution ; ensuite, vers Joubert, jeune général que la partie énergique de l’opinion républicaine avait porté, peu de temps auparavant, au commandement en chef de l’armée d’Italie, pour lui préparer précisément la voie à un rôle dominant. Mais Joubert venait de tomber mortellement frappé sur le champ de bataille de Novi (15 août). Les partis, plus impatients et plus incertains que jamais, lui cherchaient donc un successeur, lorsque, au milieu de cette lassitude et de cette attente inquiète de tous les esprits, le nom déjà célèbre et singulièrement populaire de Bonaparte fut soudainement prononcé.

Placé au premier rang des généraux de la République par ses campagnes d’Italie ; vainqueur en Orient, alors que les chefs de nos armées d’Europe étaient partout repoussés ou battus, Bonaparte avait un nom qui, pour la France, était un symbole de victoire. Quand on le croyait encore sur le Nil, rejetant dans leurs déserts ou sur leurs vaisseaux les Arabes, les Turcs ou les Anglais, et que ses bulletins, datés du Kaire, du Mont-Thabor, de Saint-Jean-d’Acre et d’Aboukir, étaient dans toutes les mains, exaltaient toutes les imaginations, son