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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 2.djvu/50

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— 1814 —

ne lui fut pas difficile de se faire adresser par les ministres étrangers des propositions que leur exagération, pour tout autre négociateur, devait rendre inadmissibles. Il les accepta. Ces propositions, on vient de le voir, ne mettaient pas seulement aux mains des Alliés des ports, des places nombreuses, de grandes et riches provinces, elles leur livraient un matériel naval, un matériel de guerre et des approvisionnements dont l’importance dépassait alors les ressources financières de la monarchie la plus opulente. Toutes les puissances, à cette époque, étaient obérées. En jetant ainsi d’un seul coup dans les arsenaux vides, dans les magasins épuisés de la coalition, un milliard et demi de valeurs, le prince de Bénévent dut se créer des droits exceptionnels la reconnaissance des souverains et de leurs ministres. Les contemporains ont affirmé que plusieurs millions furent le prix de cet indigne abandon. Est-ce une calomnie ? nous ne le croyons pas.

La convention d’armistice du 23 avril, conclue et signée sans nécessité, sans la moindre réserve, quelques jours seulement avant l’arrivée de Louis XVIII, à qui devaient seul appartenir la négociation et la responsabilité d’un tel acte, cette convention, disons-nous, constitue la trahison de M. de Talleyrand en 1814[1].

    affaire au chef du gouvernement provisoire ; il demanda le prix qu’on mettait à la maison. On lui répondit 250,000 fr. ; il les fit payer le soir même, sauf à se les faire rembourser par les joueurs. Il fallait que M. de Talleyrand n’eut pas de pressentiments rassurants pour se défaire, par de semblables moyens, de tout ce qui pouvait être d’une réalisation difficile. »

    (Mémoires du duc de Rovigo, t. VII.)

  1. « L’inventaire de la prise de possession de ces places par les Français existait encore. On proposa d’en faire la remise d’après cet inventaire, et conséquemment de ramener tout ce qui avait été tiré de l’intérieur. Mais le gouvernement provisoire reçut fort mal cette observation, et voulut que les places fussent rendues dans l’état où elles se trouvaient. Il poussa la libéralité jusqu’à à ordonner que l’arsenal de Turin, qui n’était composé et rempli que de l’ancien arsenal de Valence ainsi que des approvisionnements achetés par la France, fût livré sans en rien distraire. Il ne pouvait cependant ignorer ce qu’il abandonnait, puisqu’il y avait des états au bureau de la guerre. »
    (Mémoires du duc de Rovigo, t. VII.)