Page:Vauvenargues - Œuvres posthumes éd. Gilbert.djvu/231

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CORRESPON DANCE. 2|5 l asciner nos regards, et de donner au specleux toutes les couleurs de la veritel Si Pon vous promettait un jardin enchaute, et que l‘on vous donnat une muraille, ou, par le moyen de l’optique, vous fussiez trompe vous-meme dans la perspective, auriez-vous lieu d‘etre content? En fait de raisonnement, comme en toute autre chose, qui manque le prin- cipe, fait la statue de Nabuchodonosor *; Pon ne me persuadera jamais que le sophisme soit une suite de la justesse de Pesprit, mais bien de la subtilite. Qui dit justesse, dit suite de consequences et d’inductious, qui tirent leur force l’une de l’autre, et parvieunent eu un point qui doit etre flxe; deux et deux ne font que quatre; il est impossible qu‘iIs fassent jamais cinq; cependant, un genie s’oll‘rira de soutenir le pour et le contre, et Pexecutera, s’il conserve toujours la meme superiorite; mais, puisqu‘il depend de lui de s‘egarer, puisque ses organes lui en fournissent les moyens si e propos, qui peut lui repondre qu’il ne s’e- garera pas, meme quand il suivra la bonne route ? Sa facilite pour colorer ses premieres idees le trompera lui-meme, et sa vivacite les adopter,,, sans consulter leur liaison avec ce qui les suit et les precede, quitte a recourlr a cette meme facilite, s‘il se trouve embarrasse. Un esprit lent, au contraire, ne marche pas sans appui; le premier point d‘un raison- nement le conduit au second, et ainsi de suite; il ue devore pas sa be- sogue, mais il la mache; il en est mille exemples, et plus encore dans la conduite de la vie, que dans les ouvrages. J’ai trouve le chevalier tel que vous me l’avez dit, et je pense, comme vous, qu‘il lui faut uu peu de Paris, avant d’aller a Malte; je le souhai- terais fort, mais ma mere n’est pas de ce sentiment; ne pourrions-nous pas, ou par Meyronnet, ou par silleurs, lui pe1·suader de l’y laisser aller cet hivert Nous nous verrons, de par Dieu! cet automne, et nous jaserons; venez de bonne heure; j‘aurai Le Franc de Pompignan, et un abbe de Mouville de l’Academie, homme de l‘esprit le plus aimable '. Adieu, mon cher Vauvenargues; portez-vous bien. ¤ On sait que la statue, que Nabuebodonosor avait vue eu songe, avait la I ` tete d’un or tres-pur, et les pieds d’argile. (Aneien Testament, Daniel, ch. 2, ver:. 31-36.)- G. = S • Il etait lie avec be Franc de Pompignan, par la plus etroite amitie, et, • si Pon peut le dire, par quelque conformite d'babitudes dogmatiques et pe- • dantesques. • (Lucas-Montigny; Memoirs: de Mirabeau, 1•• vol., page 253.) Un des premiere ouvrages que publia Mirabeau, c’est un Examcn des poésies saerées de Le Franc de°Pompignan, a empbatique commentaire, dont La Harpe l ` I I