Page:Venard - Memoires de Celeste Mogador - vol 1 1858.djvu/41

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quèrent et que ma voix mourut sur mes lèvres. Il m’étouffait.

— Écoute, me dit-il, ta mère est une misérable. Il y a bien longtemps que je la cherche ; elle va me payer aujourd’hui tout le mal qu’elle m’a fait. Je sais bien qu’elle ne m’aime pas ; toi, c’est autre chose, il faudra bien qu’elle le trouve, mais elle cherchera longtemps.

Je compris que j’étais perdue. Je jetai un der- nier regard en arrière ; chaque pas qui m’éloignait de ma mère me faisait mourir. J’allais fermer les yeux, quand je vis mon chien qui me suivait. Tout mon courage me revint, je n’étais plus seule. Je regardai. Mon chien avait l’air triste : on eût dit qu’il comprenait.

Nous passâmes dans plusieurs rues, puis devant un grand passage qui me fit peur. C’était la boucherie. Tous ces cadavres de bestiaux pendus aux portes, ce ruisseau qui coulait au milieu du passage, plein d’un sang noir et caillé, les quinquets fumeux qui projetaient à l’entrée une lueur sombre et terne ; tout cela me faisait trembler de tous mes membres.

Nous étions arrêtés à l’entrée du passage. Déjà G… mettait son pied sur la première marche ; par un mouvement plus fort que ma volonté, je lui passai mes deux bras autour du cou. Il n’y prit