Page:Verdi-Aïda.djvu/21

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Un trône, et le grand nom qu’ici je dois cacher ! Quoi ! vainqueur de mes frères !… Le verrai-je, les mains teintes d’un sang chéri, Triomphant, acclamé par nos fiers adversaires, Traînant après son char mon père… un roi !… flétri. Du poids des fers meurtri ! Que cette parole Loin de moi s’envole. Qu’Aïda console Un père adoré ! Périsse la race D’un peuple abhorré !

Ah dieux ! Est-ce moi qui menace !… Et mon amour !… Oh ! non !… Puis-je oublier cette vive tendresse, Qui de l’esclave, ainsi qu’un gai rayon, Charmait la détresse !… Moi ! demander la mort de Radamès !… De celui que j’adore !… Ah ! fut-il donc jamais Tourment semblable au feu qui me dévore ?

Ces noms sacrés et d’époux et de père, Ne puis-je donc, hélas ! les murmurer ? Pour l’un, pour l’autre, en ma douleur amère, Je ne voudrais que prier et pleurer. Mais la prière est, hélas ! un blasphème, Mais les soupirs, les pleurs sont criminels, Et je n’ai plus qu’un refuge suprême, La froide mort et ses dons éternels !

Grâce ! grands dieux ! c’est trop souffrir ! Dans ma douleur plus d’espérance, Fatal amour, triste démence !… Brise mon cœur, fais-moi mourir.[Elle s’éloigne.]



Tableau 2


Scène II