Page:Verhaeren - Émile Verhaeren, 1883-1896, 1896.djvu/37

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


Elle portait une loque de manteau roux,
Avec de grands boutons de veste militaire,
Un bicorne piqué d’un plumet réfractaire
Et des bottes jusqu’aux genoux ;
Sa carcasse de cheval blanc
Cassait un vieux petit trot lent
De bête ayant la goutte,
Contre les chocs de la grand’ route ;
Et les foules suivaient, par à travers les n’importe où,
Le grand squelette aimable et soûl
Qui trimballait, sur son cheval bonhomme,
L’épouvante de sa personne
Vers des lointains de peur et de panique,
Sans éprouver l’horreur de son odeur
Ni voir danser, sous un repli de sa tunique,
Le trousseau de vers blancs qui lui tétaient le cœur.

(LES CAMPAGNES HALLUCINÉES).