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Page:Verhaeren - Œuvres, t9, 1933.djvu/113

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les villes à pignons
Subtilement de leurs lèvres artistes ;

Puis s’attardent, la bouche en rond,
À lentement goûter le « Château Rose ».
L’échevin survenu prend à son tour la pose
Des vieux buveurs d’antan qui, le verre à la main,
Et balançant leur corps sur leur chaise qui tangue,
En l’honneur des grands crus faisaient claquer leur langue.
Et tous boiraient jusqu’à demain,
N’était que le « Médoc » déjà s’adjuge
Au juge,
Et qu’un chanoine a pris pour lui
Vingt bouteilles de « Grave » et six flacons de « Nuits ».
La cave du notaire est ainsi dispersée,
Et l’archiviste et le doyen et l’échevin,
Après mainte querelle, à coups d’or apaisée,

Se désignent chacun leur part en son butin.


Le crieur éreinté est au bout de son rôle.

Voici passer encor, par ribambelles,
Les soucoupes et les écuelles,
Puis les chenets de cuivre et les plaques de tôle,
Et mille objets menus qui ne valent plus rien.
On vend jusqu’au collier qui maintenait le chien,
Et que l’on joint, pour faire un lot,
À trois marteaux et deux rabots
Trouvés dans l’appentis sous de vieilles falourdes.

Des camions pesants et des brouettes lourdes