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Page:Verhaeren - Œuvres, t9, 1933.djvu/191

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189
les plaines
Son dos compact se bombe en voûte,

Mais son oreille est fine et l’on dirait
Que son regard, même distrait,
Toujours, là-bas, du côté de la route,

Reste aux écoutes.


L’essieu criard, comme un oiseau de nuit,

Dans le sommeil profond des campagnes muettes,
Roulent, de tous côtés, vers lui,
Les gars campés sur leurs charrettes.
Ils arrivent des horizons d’Escaut
Et des fermes droites, là-haut,
Près des digues jaunes ou grises ;
Ils arrivent, par les chemins blottis
Dans les sablons de Locristy

Et les bas-fonds de Hamme et de Tamise.


Du haut de sa lucarne en bois,

Le bon meunier les aperçoit
Et d’un mot preste les aborde ;
Et vite, il leur descend sa corde :
Un nœud coulant y rattache les sacs.
Puis, sans un heurt, sans un ressac,
En ligne raide, en ligne droite,
Le seigle clair, le froment frais
S’élève, est englouti et disparaît

Par une trappe étroite.