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les villes à pignons


À l’auberge des « Trois Guirlandes »
Sont installés les vieux joueurs,
Qui s’angoissent et qui l’attendent.
Il arrive, gorge sèche, front en sueur ;
Un silence se fait : le vainqueur se désigne,
Et l’échevin, très gravement, consigne,
Sur des feuillets lignés où pèse une écritoire,
La victoire.

Et surviennent après, ceux dont le sort
Fut moins heureux, mais fut heureux encor ;
Ils déclinent leur nom : tous gagnent ;
Il en accourt des bourgs et des campagnes,
Avec, sur leurs pieds nus, la crasse des sentiers.
Leurs bras levés balaient, d’un coup de bière,
L’âpre poussière
De leurs gosiers ;
Et tels s’en vont, serrant leur bien,
Et tels se croient nimbés de gloire
Et paient gaîment à boire.
Seuls, les derniers n’ont rien,
Et leur fureur et leur déveine se butent
Aux poings tendus des cris et des disputes.

Et dans son prône, exaspéré,
Le vieux curé