Page:Verhaeren - Deux Drames, 1917.djvu/127

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Avec terreur, avec angoisse, avec amour,
Mordre la chair impie avec ses dents brûlantes.
Son droit est souverain, si sa force est sanglante
Rome est utile à tous, à tous, surtout aux rois,
Tous la craignent et la suivent — il n’est que moi
Qui porte au cœur assez d’ardeur qui fertilise
Pour être en même temps et l’Espagne et l’Église
Et le monde à moi seul.

LA COMTESSE

Et le monde à moi seul.Tu t’enivres, Carlos !

DON CARLOS (furieux)

Non, non, non, non !… Ma tête est battante de flots
Si merveilleux d’orgueil qu’il n’est rien que je craigne.
La puissance des rois datera de mon règne.
Ce palais qu’on achève est comme un mont géant
Trop large pour mon père, et construit à ma taille.
On peindra sur ses murs l’élan de mes batailles
Et de mes vaisseaux d’or, trouant les Océans
Et les horizons fous des bonds de leurs conquêtes ;
Un bruit de gloire immense accueillera mes pas.