Page:Verhaeren - Deux Drames, 1917.djvu/145

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Rien n’entravait l’essor merveilleux de nos pas
Sur les routes en or qui dominent la terre…

LA COMTESSE

Ce que tu vois existe seul.

DON CARLOS

Ce que tu vois existe seul.Non pas ! Non pas !
Oh ! que mon corps est lourd et plein de sa misère !
Tout se dérobe à mes regards et tout s’enfuit ;
Je ne sens plus sur moi que ténèbre et que nuit ;
Un instant me reprend ce qu’un instant me donne ;
Ton amour même, hélas ! hésite et m’abandonne,
Je recule et j’ai peur et tout à coup je vois
Comme en un gouffre avide et noir sombrer mes droits…

LA COMTESSE (ardente)

Ce que tu vois, c’est ta jeunesse et ton courage,
C’est ta gloire, c’est l’univers
Sauvé par toi, sous les éclairs
Du formidable et mortuaire orage
Que Philippe déchaîne et qu’il voudrait grossir.
Il appartient à ton orgueil de ressaisir,