Page:Verhaeren - Les Ailes rouges de la guerre, 1916.djvu/237

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ceux qui se sont battus avec force et furie.
Le sol qui les aima leur a fait bon accueil,
Si bien que n’ayant ni suaire ni cercueil,
Ils sont, jusqu’en leurs os, étreints par la Patrie.

Parfois,
En robe toute droite, ou de toile ou de laine,
Celle qu’ils acclamaient aux jours d’orgueil, leur Reine
Vient errer et prier parmi leurs pauvres croix ;
Et son geste est timide et son ombre est discrète ;
Elle s’attarde et rêve et quand le soir se fait,
Vers les dunes, là-bas, sa frêle silhouette
Avec lenteur s’efface et bientôt disparaît.

Tandis que lui, le Roi, l’homme qui fut saint Georges,
S’en revient du lieu même où l’histoire se forge
Aux bords de l’eau bourbeuse et sombre de l’Yser ;
Il rêve, lui aussi, et rejoint sa compagne,
Et leurs pas réunis montent par la campagne,
Vers leur simple maison qui s’ouvre sur la mer.