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Patiemment, mais fermement, impose à tous
Sa volonté rugueuse et ses vœux populaires.

Les bras des longs canaux que le couchant fait d’or
Serrent près du beffroi, comme autour d’un refuge,
Toute la gloire ancienne et dolente de Bruges.
La ville est fière, et douce, et grande par la mort.
Mais néanmoins, toujours, monte vers la lumière
Le rectiligne élan de sa beauté guerrière
Et son bourdon réveille un trop vivant écho
Pour éternellement pleurer sur un tombeau.
Bruges écoute au loin les flots chanter aux grèves
Et Bruges se souvient et veut ressusciter :
Voici le chemin d’eau vers son port souhaité
Et les vaisseaux d’orgueil pour embarquer son rêve.

Anvers, c’est l’océan dompté et prisonnier
En des bassins de fer, degrés ou de basalte :
C’est tous les pavillons du monde dont s’exaltent
Les lions d’or, au bout des focs et des huniers ;
Anvers, c’est le grand cri de la Flandre à l’espace,
C’est l’effort qui s’enrage et, chaque an, se surpasse,