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MOINE ÉPIQUE 15


N’ayant rien qu’une croix, taillée au coeur des chênes,

Mais la bouche clamant les ruines prochaines,


Mais fixes les regards, mais énormes les yeux,

Barbare illuminé qui vient tuer les dieux.


Maintenant qu’il repose obscurément, sans bière,

Dans quelque coin boueux et gras de cimetière,


Saccagé par les vers, pourri, dissous, séché,

A voir le tertre énorme où son corps est couché,


On rêve aux tueurs d’ours, abattus dans la chasse,

A ces hommes d’un bloc de granit et de glace


que l’on n’enterrait point, mais dont les restes lourds,

Sur un bûcher tendu de soie et de velours,


Dans le décor géant des forêts allumées,

Au fond des soirs, Ià-bas, s’en allaient en fumées.