Page:Verhaeren - Les Villes tentaculaires, 1920.djvu/206

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Et voici la justice et la pitié, jumelles ;
Mères au double cœur dont les claires mamelles
Versent le jour clément et se penchent vers tous.
Ceux d’aujourd’hui les affichent deux ennemies
Luttant avec des cris et des antinomies,
Au nom de Christ, le maître abominable ou doux,
Selon celui qui interprète ses paroles.
La loi qui est déesse, on la proclame idole ;
Et les codes sont des meutes qu’on dresse à mordre ;
Et la peur règne — mais l’ordre,
Qui doit s’ouvrir comme une grande fleur
Libre et vive, malgré ses milliers de pétales,
Dont nul n’a comprimé l’ardeur,
Puisera l’équité dans la bonté totale.

Oh ! l’avenir montré tel qu’un pays de flamme,
Comme il est beau devant les âmes,
Qui, malgré l’heure, ont confiance en leur vouloir.
Tant de siècles ne détiennent l’espoir,
Depuis mille et mille ans, indestructible,
Sans que tous les désirs ligués, frappant la cible,
Ne tuent un jour la haine et n’instaurent l’amour.