Ou bien leur si grande misère
Tels soirs, quand, à genoux, nous demandons pardon
L’un à l’autre, d’être sur terre.
Pourtant, comme l’amour nous fut triomphe et reconfort ;
Comme nous nous sommes grandis quand même,
Sous l’exaltant et douloureux baptème
Dont son ardeur fut le flot d’or.
Comme notre âme et notre torse
Se sont haussés et déployés en force
Pour absorber le merveilleux effroi
Des lacs d’amour qu’on sent s’illimiter en soi.
Comme notre être a recréé sa conscience,
En ces conflits d’émois de cris et de démences ;
Et comme il a, vers l’ombre et vers la nuit, jeté
Le ramas noir des vieux préceptes dévastés.
Et qu’importe se perdre en des tortures
Et se tant déchirer et s’étreindre pourtant
Et raviver toujours l’effrayante aventure,
Si c’est, pour s’éprouver plus fortement battant,
Au rythme haletant,
Qui fait volter et fermenter le sang
Par à travers l’éternité de la nature !
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