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Et foudroyant, sur son cheval de gloire,

Troubla si fort la joie et la mémoire,
Que tels buveurs ne voulurent s’en taire.
Fallait-il qu’il fût à l’avenir leur maître,
Lui, le cavalier d’or et de clarté
Au lieu du vieux saint Pierre, apôtre et prêtre ?
Fallait-il voir en ce prodige, apparenté
Aux miracles sacrés,
Une fête nouvelle à célébrer ?
La Saint-Michel tombe en Septembre
Lorsque déjà les jours sont courts
Et les feuilles couleur de l’ambre.
Le geste net d’un métayer goulu
Mit fin à l’entretien, et l’on conclut :
« C’est au doyen de se tirer d’affaire. »

Et la fête reprit sa fureur ordinaire.

 

Les jours après les jours passèrent,

Quand tout à coup les coups de boxe
Et les assauts de l’équinoxe
Ameutèrent les eaux et fendirent la terre.
Un orage grandit : les ravages couraient
De l’un à l’autre bout de la forêt.
Le vieux moulin, pauvre et branlant
Fut renversé, comme un enfant ;
La mort rôdait autour des chaumes,
Les tours semblaient de grands fantômes

Et l’on eût cru que le monde passait