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Page:Verhaeren - Poèmes, t1, 1895, 2e éd.djvu/171

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les flamandes

Ne faire de son corps qu’une table dressée,
Où son gars mangerait et boirait jusqu’au jour,
La bouche gloutonnante et la manche troussée.
Tout un festin de chair, de jeunesse et d’amour !
Et pendant qu’il la chauffe, ils vont par les saulaies,
Par les sentiers moussus, faits pour s’en aller deux,
Ils vont toujours, tirant les feuilles hors des haies,
Les mordant avec fièvre et les jetant loin d’eux.
Il confie en riant ce qui troublait sa tête,
Avant qu’il n’eût espoir certain de l’épouser,
Il se rappelle encor — tout comme elle — la fête
Où de force il plaqua ses lèvres d’un baiser.
Mais c’est elle, à présent, qui s’en poisse la bouche,
Qui s’en soûle et s’en gave aux godailles d’amour,
Au grand air, sous l’éclat du soleil qui se couche
Et dans le rouge adieu de la nature au jour.
Et d’un commun accord, sans pourtant se rien dire,
Au coude d’un chemin menant droit aux fouillis,
Le cœur battant son plein, le visage en sourire,
Ils cherchent où s’asseoir dans l’épais des taillis.
Et près d’un blond carré d’orge, dans la verdure
Fraîche et vibrante encore et gazouilleuse au vent,
Ils dénichent, comme au hasard, une encoignure,
Faite d’un bois derrière et de buissons devant,