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les moines


Il y jette sa force et sa raison de fer,
Et le feu de son âme et le cri de sa chair,

Et l’œuvre est là, debout, comme une tour vivante,
Dardant toujours plus haut sa tranquille épouvante,

Empruntant sa grandeur à son isolement,
Sous le défi serein et clair du firmament,

Cependant qu’au sommet des rigides spirales
Luisent sinistrement, comme des joyaux pâles,

Comme de froids regards, toisant Dieu dans les cieux,
Les blasphèmes du grand moine silencieux.



Aussi vit-il, tel qu’un suspect parmi ses frères,
Tombeau désert, vidé de vases cinéraires,

Damné d’ombre et de soir, que Satan ronge et mord,
Lépreux moral, chauffant contre sa peau la mort,