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les apparus dans mes chemins


Le phare à feux rouges du pays de la boue,
Lorsque tombe le soir, secoue
Comme un meurtre chevelu d’or, dans l’air,
Alors, les crins de lumière battent mon âme
Elle s’avive, une heure, au sang de cette flamme
Puis retombe, lourde bouée,
Vers les ténèbres, refoulée.
Au long des plages de la mer,
Mon âme ! — elle est clamante et gémissante.

Vous les Nixes, là-bas, aux ceintures de givre,
De neige et de splendeur coiffées,
Qui possédez ce don de vivre
Claires, dans la stérilité ; reines et fées,
Des lointaines et lucides Baltiques,
Sous des ciels d’or lunaire, au Nord,
Quand vous tiendrez, en vos pâles bras forts,
Mes vieux désirs embarqués sur la mer,
Épuisez-les, faites-les pierre et que leur sort,
Après tant d’affres, soit enfin d’être des morts.
Cœur contre cœur, cœur de gel, cœur de rêve,
Pénétrez-vous, en vos noces de cristal blanc,
Et que tous deux quand votre nuit s’achève
Il vous reste la mort profonde, en votre flanc.