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les villages illusoires


Les cercueils blancs sont pleins de ses douleurs :
Voici ses désirs fous vers les soirs mortuaires,
Voici ses deuils d’il ne sait quoi, voici ses pleurs
Tachant de sang le lin pieux de ses suaires.

Voici ses souvenirs et leurs regards usés
À venir de si loin, par à travers les heures,
Lui rappeler la peur dont leurs âmes se meurent ;
Voici le torse en deux de son orgueil cassé.

Voici son héroïsme à qui rien ne répond ;
Son courage ployant, sous sa lourde armature,
Et sa pauvre vaillance, avec des trous au front,
Et ses grands yeux, changés en nids de pourriture.

Le fossoyeur regarde au loin les chemins lents
Marcher vers lui, avec leurs poids de cercueils blancs.

Ce sont encor ses plus nettes pensées,
Une à une, sous sa tiédeur, décomposées ;
Ce sont ses purs amours des jours naïfs,