Page:Verhaeren - Poèmes légendaires de Flandre et de Brabant, 1916.djvu/33

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
Serraient violemment la gorge, au coin des rues.

Le ciel était là-haut triomphalement bleu.
Tous les seigneurs s’étaient massés sur la grand’place :
Ils admiraient les deux estrades d’or
Qui s’y carraient, dans un décor
De guirlandes et de rosaces ;
Sous les porches profondément voûtés,
Les plus belles femmes de la cité
Apparaissaient en souveraines ;
Et reine et roi disaient ne pas comprendre
Qu’il se montrât autant de reines

Que de dames, en Flandre.

 

Bientôt, le moment vint

Des agapes et des festins :
En des verres profonds s’irradiaient les vins,
Des échansons passaient, jeunes, rieurs, alertes,
En pourpoint jaune, en toquets bleus, en manches vertes ;
Des cuisiniers tendaient, du bout de leurs bras forts,
Les rouges venaisons saignant, sur des plats d’or ;
Les convives liaient d’amicales paroles ;
La méfiance quittait les yeux ; les banderoles

Laissaient avec leurs devises, jouer le vent ;