brûlée ; ce qui en reste demeure le vestige d’un admirable et pathétique chef-d’œuvre.
La même année est exécuté le Jacob bénissant les fils de Joseph, musée de Cassel. La douleur du patriarche, l’attitude de son fils et de sa bru, les deux enfants Ephraïm et Manassé, concourent à donner une impression profonde de résignation et de tendresse. L’âme du peintre se confesse en cette scène de douceur funèbre. La facture est aussi simple et aussi large que possible. Les tons ne se heurtent point ; ils se nuancent, se graduent ou s’effacent avec une entente souveraine de l’unité partout maintenue.
Le Reniement de saint Pierre (1606, musée de l’Ermitage) est aussi tragique que le Jacob. Quant au Christ à la colonne du musée de Darmstadt, c’est le drame même de la vie de Rembrandt qui semble s’y dévoiler. Dans la torture de celui qui représente à ses yeux toute la souffrance, il retrouve la sienne propre. Les bourreaux violents et féroces sont ses persécuteurs ; la colonne où la chair et les membres divins sont attachés lui apparaît comme le pilori où l’on a cloué sa réputation et son honneur. Toute la rage qui s’étale en cette page, il l’a sentie acharnée sur lui-même, et, comme Dieu, c’est par la bonté qu’il veut y répondre. Aussi la face du Christ, qu’il interprète si souvent avec une telle compréhension du surnaturel, s’éclaire-t-elle ici plus souveraine encore qu’ailleurs.
On ne sait en quelles circonstances lui fut faite la com-