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mémoires d’un veuf

montrant des narines en disproportion. la bouche toute appétits et ces yeux bridés qui s’épanouissent subits !

II


Les gâte-sauces vont et viennent rares mêlés à la foule pauvre, des paniers recouverts d’une serviette si blanche sur leurs têtes, et que çà sent donc bon derrière eux ! Ainsi exclame à part soi Pierrot chaque matin, chaque soir et chaque après-midi en s’en allant à l’école et en s’en évadant à pas pressés, sa boîte à livres pendue à deux bandes de lisière pardessus une épaule lui battant sur son derrière. Aujourd’hui il n’y tient plus, les godiveaux embaument trop, c’en est fait. Il bouscule l’un de ces gamins célestes, anges des bons dîners, qui tombe et son panier avec. Blanc par ci, blanc par là. La belle toque du pauvre petit bougre vole au vent sans calembour, puis nage dans le ruisseau. Ses coudes, ses omoplates de coutil neigeux, baisent rudement le dur pavé fangeux, et le pantalon bleu à petites raies blanches a dans sa partie postérieure proprement dite reçu la même caresse dont son contenu et lui se fussent bien passés, tandis que le dolent jean-bout- d’homme voit trente-six chandelles et plus encore. Panier par ci, serviette par là, sauce en haut, croûte en bas, quenelles à droite, crêtes à