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mes prisons

Qu’as-tu fait, ô toi que voilà
De ta jeunesse ?

. . . . . . . . . . . .

Je voyais aussi, spectacle également mélancolique, monter la garde, de long en large, au ras du mur, à l’intérieur bien entendu (et pourquoi à l’intérieur ?), un chasseur-éclaireur, chapeau de soie à plumes de coq, tunique vert foncé, je crois, pantalon gris, qui paraissait s’embêter ferme durant les deux heures de sa faction. Et il avait beau être relevé et remplacé, son successeur ne présentait pas plus que lui ni que son prédécesseur les symptômes d’un trop vif enthousiasme dans l’accomplissement de cette, d’ailleurs, assez absurde consigne. Les braves garçons semblaient se dire : « À quoi bon se promener ainsi, avec un fusil sur l’épaule et sac au dos pour surveiller et tuer au besoin de pauvres diables si bien cadenassés et verrouillés et morts à moitié déjà ?

Mais j’avais d’autres distractions dont la principale consistait à correspondre avec mon « voisin », un notaire. L’alphabet phonétique proprement dit, alors, fut largement pratiqué par nous. Le connaissez-vous, au moins de réputation ? Ça consiste à taper sur un mur un coup pour A, ou au contraire, ou autrement un coup pour Z, ou au contraire ou autrement, et ainsi de suite. Que de petites joies volées ainsi, assaisonnées de la crainte d’être sur-