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mes prisons

d’intenses théologies, se reportèrent de l’anglais au latin, non seulement des Pères, saint Augustin, ce sublime congénère, dont j’étais ou me croyais alors l’infime succédané, mais, parmi les profanes et les classiques, Virgile, et toutes les Églogues, toutes les Géorgiques, une grande partie de l’Enéide y passèrent.

Le bon directeur de la prison et l’excellent aumônier potassaient avec moi presque tous les jours.

Enfin, j’avais un gardien, qui, voulant quitter « la boîte », comme il disait, « complétait son instruction » en vue d’entrer ailleurs, me demanda un beau jour de lui donner des leçons de français. Et nous voilà, moi dictant, lui, écrivant de sa grosse écriture, d’abord des exemples de grammaire :

Êtes-vous Madame de Genlis ? etc.


et, quand des progrès réels furent accomplis, des tranches soigneusement choisies des Aventures du jeune Télémaque par M. de Salignac-Fénelon, archevêque de Cambrai.

En échange de ces leçons, le brave garçon me procurait des douceurs, journaux locaux, gâteaux, chocolat, parfois la goutte et très souvent, — ô joie, ô reconnaissance ! — de la chique (or la chique était défendue) et la difficulté d’en dissimuler les