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quinze jours en hollande

fois devant les Syndics de Rembrandt, toile magnifique, magique ! les beaux personnages si bien, si logiquement campés. En face on a eu l’idée, baroque ou logique, de pendre un tableau de Troost, pastelliste de talent du xviiie siècle. C’est aussi une série d’hommes (en perruques régence avec un ruban mignard aux retombées de la perruque sur les épaules). Ils sont tout en bleu ciel, rosés, l’air point bon. Ce sont les régents d’un Orphelinat qui représentent admirablement dans leur aspect dur et frivole les classes dirigeantes d’alors enrichies par la compagnie des Indes — à la droite de ce tableau curieux quand même, un malingre orphelin, comme un chien galeux se tient respectueux et blotti. Je m’imagine ce que doivent penser les syndics d’en face de leurs compatriotes de deux générations après, et de


« Leurs méfaits plus hideux encor que leur… tenue ! »


Nous retrouvons Troost et son talent minutieux mais gâté, dans une salle latérale qui pourrait s’appeler musée des horreurs. On y voit toutes sortes de cadavres plus ou moins dépecés par tels et tels chirurgiens. Juste en face, encore un Rembrandt malheureusement brûlé dans sa hauteur, mais où éclatent tout le génie, toute la haute franchise du Maître qui n’hésite pas à nous montrer le ventre ouvert, le crâne trépané et la cervelle d’un sujet.